Cette carte photo, non signée, non datée, montre probablement les obsèques le 31 août 1932, de Mme Virginie Hériot, une yachtwoman célèbre pour sa combativité lors des régates dans les années 30 à Arcachon, et quartier-maître d'honneur de la Marine française - elle porte deux galons rouges sur la manche de sa vareuse.

Elle avait voulu être immergée en mer, son cortège funéraire fût minutieusement réglée entre marins de la Royale et représentants de la très select Société de la voile d'Arcachon. A la veille des obsèques cette circulaire fût diffusée aux membres de la société (cliquez pour agrandir):

Elle devait être conduite à sa dernière demeure à bord de son magnifique yacht, Ailée. Son cercueil devait être transportée sur son yacht depuis la jetée de la Chapelle, à bord d'une vedette du contretorpilleur Lynx.

Las, la famille ne l'entendait pas de cette oreille, et si le cortège a bien eu lieu, la défunte a été enterrée en terre chrétienne...

A la mort de sa grand-mère, Hubert de St-Senoch, le fils de Virginie, fera enfin respecter les dernières volontés de sa mère. Le 28 juin 1948 "le Basque", torpilleur de l'Ecole Navale, rend un dernier hommage à sa bienfaitrice en procédant à l'immersion du cercueil de Virginie ... au large de Brest.

La mer et la voile doivent beaucoup en France à Virginie Hériot. Née en 1890, dans une famille richissime, elle commence à naviguer dès l'âge de 10 ans et ne cessera plus jusqu'au jour de sa mort. Elle aura ainsi parcouru 143.000 milles soit sept fois le tour de la terre.

En 1912, elle participe pour la première fois à la coupe de France de yachting et ne cessera plus de courir les mers, même si elle trouve le temps de se marier à 22 ans avec François Haincque de Saint Senoch, de lui faire un enfant, Hubert et de divorcer à 30 ans. Désormais ne compteront plus que la mer et ses bateaux, qu'elle appellera tous Aile.
En 1927, elle remporte la OneTonCup, créée en 1899 par le Cercle de la Voile de Paris, le plus ancien et le plus prestigieux trophée français du yachting. Elle reste à ce jour la seule femme à l'avoir remportée. En 1928 elle est championne olympique aux jeux d'Amsterdam dans la catégorie 8 mètres Jauge Internationale, sur Aile VI.

Elle meurt donc en 1932, mais cette belle histoire ne s'arrête pas là; son bateau, héros des JO d'Amsterdam, erre de propriètaire en propriètaire jusqu'en 1994, quand des amateurs passionnés le découvrent dans un hangar abandonné à Saint Malo. Ils l'achètent, le restaurent et Ailé VI est remis à l'eau en 1996 au Bois de la la Chaize sur l'île de Noirmoutier et participe depuis aux grandes régates de sa catégorie.

Source et crédit photos : Collection Société des Régates du Havre, Le cercle de voile du Bois de la Chaize